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2 mai 2012 3 02 /05 /mai /2012 09:32

Ma ville

De réverbère en paire de jambes

Dénudées à trois heures

D'enseigne en parking fluorescent

De viole en jardin suspendu

Paumée à sept heures en janvier quand tu peux la traverser sans rencontrer

Personne d'autre que les laveurs de rues et de vitres

Celui qui finit par un café tombé sur la première chaise descendue à l'ouverture

Echue au fond gris de ce verre de bière collant au bord où finit la mousse

Les bus et les éboueurs se croisent

Il a plu      il pleuvra

Il frissonne      on éteindra un peu partout

Tandis que s'allument les fenêtres

Pas de couleur, d'odeur, de nom

Elle stagne et je tangue sans croire à l'aube qui, déjà, il faut le savoir, brûle à l'horizon, à l'Est, et incendie les vitres du port. (1974)

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1 mai 2012 2 01 /05 /mai /2012 09:20

Il reste une langue de terre saisie entre la Méditerranée et les Alpes,

un territoire béni des dieux,

une faille sismique une lame sur laquelle nous évoluons l'oeil rivé sur un ailleurs occidental,

sur un ailleurs oriental, mais jamais là.

 

 

Pendant des années je l'ai prise pour une ville de plein air.

Je ne connaissais d'elle que ses rues, ses places, ses terrasses, ses cafés,

peu de ses habitants,

presqu'aucune maison de l'intérieur.

 

A Nice il faut humer l'air avant de sortir :

les itinéraires doivent beaucoup de leur charme à cette précaution.

 

Chaque jour je tournais autour d'elle comme Jérôme Leys autour de la Cité Interdite.

Elle était pour moi avant tout nocturne et matinale. Je rencontrais ses artistes.

Ses clochards et ses arroseurs publics m'étaient voisins.

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30 avril 2012 1 30 /04 /avril /2012 11:38

Si je dessine Nice, je dessine une courbe,

je dessine du même geste le sens du vent,

les palmes s'enroulant autour du stipe;

l'humeur des vagues qui façonne les galets;

des lignes de fuite prennent les collines à rebrousse-poil;

les olives restent accrochées aux branches fourchues

défiant le Mistral (1er février 1997, bar-tabac de la place Garibaldi)

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29 avril 2012 7 29 /04 /avril /2012 09:51

Description d'une baie sur la Méditerranée

Le ciel gris se teinte d'une pointe rose tournant au mauve, tandis que la ligne d'horizon passe au bleu outremer. L'air est d'une telle pureté qu'un cristal effleuré au centre de la baie eût certainement résonné jusqu'au centre de la pièce. Sur la droite, les maisons s'étagent contre la colline aux rondeurs gris-vert, amphithéâtre ocre jaune qu'éclairent les premier rayons d'un soleil encore à l'abri de la barrière orientale.

 

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28 avril 2012 6 28 /04 /avril /2012 08:46

La civilisation française s'est formée dans le sillage des conquérants, abandonnant les dieux germains et celtes pour les romains, accueillant les lois romaines et plus tard puisant sur les pas de François Ier dans le trésor de la Renaissance, trouvant son inspiration dans l'antiquité grecque et latine, décorant du mobilier à la pompéïenne, s'inspirant d'Athènes et de Rome pour inventer la République, hissant à sa tête un Corse, presque génois... Le dix-neuvième siècle est véritablement le moment de l'affrontement des thèmes civilisateurs du Nord et du Sud de l'Europe. Au Sud, la pauvreté l'a emporté, les terres méditerranéenne font l'objet de plusieurs tentatives d'intégration : l'Algérie, le Maroc, la Tunisie, la Tripolitaine, continuellement les nations européennes tentent d'enlever à l'Afrique ses terres méditerranéennes, de dire quelque chose comme "Il n'y a plus de Méditerranée, elle est à nous".

 

Mais les découpages en zones maritimes n'excèdent pas le plateau continental qui, en Méditerranée, gagne bien vite les fosses.... et tout de suite, la mer brouille les frontières.

 

La mer ne rapproche que la Corse quand on la voit bien découpée flottant entre ciel et mer, les jours froids de février. Ils la contemplent sans ciller tout au long de la matinée, tandis que s'éloignant elle s'amenuise et s'efface. Au-delà du mirage c'est Alger la blanche qui encore disparaît, c'est Tunis.... A l'heure des avions, on oublie l'émotion que constituait la lente dissolution de la ville pour les entassés à la poupe, tandis que peut-être les enfants excités par la nouveauté du paquebot, et d'enfin fouler cette mer, et d'en mesurer heure par heure la distance jusqu'ici infinie mais qui va s'échouer à Marseille, à Gènes, à Port Vendre, Alicante, Cartagène... tirent leurs parents pour, oubliant le sillage, gagner la proue.

 

 


 

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27 avril 2012 5 27 /04 /avril /2012 09:10

Cette sensation, je tends la main et je touche l'univers, je me place devant la table d'orientation de Saint Césaire sur Siagne et toutes les villes du pourtour méditérranéen sont à ma portée. A Nice, nous devrions tous avoir chez nous une table d'orientation qui nous situerait immédiatement dans cette patrie étrange, qui n'est que bords, dont toutes les villes tour à tour furent des capitales, des villes phare, des bourgades dont le nom estampillait des amphores et des ballots qui par la mer rouge, par Gibraltar, ou par les routes des Alpes gagnaient tout l'Orient et tout l'Occident.

 

Cette communauté plurilingue, pluriraciale, pluriconfessionnelle, s'est formée pendant des siècles au rythme de guerres terribles, mais les bouleversements politiques et géophysiques ont contribué semble-t-il à inscrire définitivement les hommes dans son sol et dans son histoire par le fait même des drames identiques qu'ils ont dû subir. Par un effet de capillarité frontalière qui, à l'image même des golfes méditerranéens, crée une communication en cascade, les peuples maritimes se sont mêlés : rapprochés par le climat et par des racines linguistiques, ils ont tricoté une patrie, mais pas une nation. Lançant des ponts d'île en île ils ont franchi la mer et se sont ancrés au fur et à mesure des invasions et des émigrations dans des paysages identiques, dont les éléments totémiques, le pin, l'if, la mer et ses vents, le bleu, le soleil et l'olivier, leur permettaient de persévérer dans leur culture.

 

Ces éléments, ce sont justement ceux que les artistes ont relevés, avec quelques autres telles les ruines, thème typiquement méditerranéen, et qui perdure. Comme disaient nos ancêtres : " Nous irons demain contempler les ruines ...", et méditer sur la fragilité des civilisations.

 

Un juste équilibre semble maintenir la modernité dans le périmètre de ces antiquités : Le Caire s'évertue à ne pas intégrer ses pyramides, Athènes s'écrase encore au pied de l'Acropole dont infiniment dénombre et on assemble les vestiges..... Rome voit s'effondrer Pompéï dont la sauvegarde n'est plus la priorité économique. Sur les ruines ont été bâtis parfois des monuments, des mieux,  ruinés à leur tour comme les sept villes de Troie ou tout simplement les églises gothiques surmontant des bases romanes.

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26 avril 2012 4 26 /04 /avril /2012 09:12

Braudel cite le vieux prince Doria : (1468-1560 : "Il y a trois ports sûrs : Carthagène, juin et juillet." Il poursuit en citant Hésiode (lorsque vient l'hiver et que bouillonnent les souffles de tous vents, il faut tirer le vaisseau sur le rivage et travailler la terre). A Venise en 1569, on ne naviguait pas du 15 novembre au 20 janvier, et chez les Levantins on prenait la mer du 5 mai au 26 octobre.

La saison sur la Riviera correspondait à cet hiver-là, d'octobre à mai.

 

Vivre au bord de la Méditerranée, c'est donc longer la mer, bénéficier de ses vents, obéir à ses exigences. C'est la mer qui rejette l'homme sur ses rives, c'est de la mer que viennent les barbaresques à cause desquels on bâtit des perchoirs fortifiés, et non pas contre lesquels on lutte. Les habitants sont des fuyards qui reviennent le calme rétabli frayer avec les intrus. Toutes les races se mêlent. La Méditerranée n'est pas une frontière, c'est un sas. Ainsi, quand on habite une de ses villes portuaires, on a l'impression d'être en communication avec tous les peuples que les routes terrestres et maritimes convoient dans un va-et-vient incessant de conquêtes et de commerce.

 

Les mers intérieures se prolongent d'isthme en isthme, de porte en porte, confondant leurs légendes, mer Thyrrhénienne, Adriatique, Ionnienne, Archipel de Marmara, mer de Candie, mer Noire, mer d'Azov, du Levant...  Les Golfes de Venise, de Salonique, d'Orfano, de Scalanova, de Mendelia, de Kos, d'Egine, de Nauplie, de Marathonisi, d'Arcadie, de Corinthe, d'Acta, de Drin, de Gênes, du Lion, tous les golfes de Corse et de Sardaigne, le golfe d'Oran, de Bougie, de Philippeville, de Tunis, d'Hammamet, de Gabès, d'Alexandrette, d'Adalia, de Karkinit....... Tous ces noms sonnent grec ou romain, comme si dans la découverte du monde, seul le regard de l'autre, de l'envahisseur, du découvreur, pouvait désigner, nommer.

 

Si la Chine s'est intitulée l'Empire du Milieu, la Méditerranée est son équivalent occcidental, l'autre pôle dont l'extrême étroitesse a déterminé le rayonnement. D'ici à là, d'Athènes à l'infini. Et tout lieu où le conquérant méditerranéen pose sa tente devient le point d'origine non pas du monde, mais de l'observation du monde. Jusqu'à l'Indus, Alexandre tend son regard au loin et sans détruire les dieux qu'il rencontre les intègre à son panthéon, se faisant élire dieu et empereur dans toutes les langues.


 

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25 avril 2012 3 25 /04 /avril /2012 08:50

Et si je pense à la Méditerranée, je peux dire que c'est un lieu de méditation, un simple lieu de méditation, quelle que soit la saison, une rive qui m'est familière, où je me tiens sans lire. Un point d'appui pour le regard. Un lieu de fascination : on peut ne pas s'y soustraire. Un risque d'y perdre la vie. Soutenir la mer du regard. Laisser ses yeux plonger dans cette masse liquide et dense. Ce dont le lapis-lazuli est le plus proche. Une pierre dure.

 

Ce qu'il y avait de propre à la Méditerranée, c'était sa résistance à l'idée même de voyage. Quelque chose de comparable au bout du monde. Infranchissable. Ne plus jamais pouvoir m'y rendre. Un lieu non pas inquiétant mais complètement interdit. Pas tant immense que haut. Un mur bleu.

Incapable d'y nager et incapable d'y naviguer.

 

Il reste une langue de terre saisie entre la Méditeranée et la montagne, un territoire béni des dieux, une faille sismique, une lame sur laquelle nous évoluons l'œil rivé sur un ailleurs occidental, sur un ailleurs oriental, mais jamais là.


 

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24 avril 2012 2 24 /04 /avril /2012 16:37

A mon tour, si je ferme les yeux et si j'entends le mot "Provence", je ne vois pas ce village abandonné au-dessus de Saint Césaire, je ne vois pas les collines derrière la grande vitre qu'on a scellée dans les pierres afin qu'un séisme la fendît, toujours bleutées. Je ne vois pas les pins énormes qui désignent la maison depuis le fonds de la Siagne sur la route de Draguignan. Je ne vois pas la pierre qui avait été posée sur le pilier pour qu'on la fasse sonner en arrivant. Je ne mange pas pour la première fois les fanes des radis. Je ne guette pas, quand le vent se lève si froid qu'il bouleverse l'énorme chaleur et, rasant les garrigues de thym et de romarin, soulève les brindilles, les enflamme et les porte de part en part de la montagne, les incendies. Je ne passe pas la matinée à tenter de dessiner le tronc d'un arbre mort. Je ne lis pas "Ainsi parlait Zarathoustra" appuyée contre un muret tandis qu'une ânesse braie, prête à mettre bas. Je ne reste pas dehors à épier les étoiles en entendant un air de flûte.

 

Je vois tout simplement un tableau d'oliveraie que mon grand-père vient d'acheter : il ferme ma main en lorgnette et me conseille de regarder de cette façon par fragments la toile en me pressant : "Tu entends les cigales ? Tu entends les cigales ?"

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23 avril 2012 1 23 /04 /avril /2012 09:47

La Méditerranée c'est une île improbable autour de laquelle les civilisations mènent la ronde. Habiter sur ses bords, c'est se laisser traverser par cette onde mythologique, philosophique, artistique et s'émerveiller de cet enchevêtrement de récits que nous sommes invités à exhiber.

Mais quant à en être inspiré, voilà une autre histoire.

 

Sans doute faut-il une distance – pas forcément nostalgie – pour éprouver la nécessité de parler des choses quand on ne s'et pas donné pour objet le témoignage instantané, l'œuvre subite.

 

Ce que je dis est filtré par un certain oubli, un certain laps de temps.

 

Quant au bonheur, c'est une préoccupation de peintre. Le peintre, qui vit dans la lumière, dans l'instant de ce qui se passe entre lui et le modèle, fait entrer à flots dans l'atelier la lumière, son geste trahit les courbatures de son corps, les couleurs restituent peut-être moins ce qu'il voit que ce qu'il vient de voir quand ayant quitté sa place il s'est penché vers la mer à travers les palmiers au-dessus des roches rouges et des acanthes immortelles.


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